Les banques centrales en première ligne

Les instituts d'émission ont permis le refinancement des établissements de crédit, sans parvenir à juguler jusqu'ici la crise

Depuis l'été, face à la crise de confiance née de celle des subprimes, les banques centrales ont dû réagir en urgence et prêter des liquidités aux établissements qui ne parvenaient plus à se financer sur le marché interbancaire. La Réserve fédérale américaine (Fed), la Banque centrale européenne (BCE), la Banque nationale suisse (BNS), la Banque du Canada et la Banque d'Angleterre ont même mené des opérations conjointes, en décembre 2007 et en mars 2008, pour apporter de l'argent aux établissements financiers à court de ressources, comme elles l'avaient fait après les attentats terroristes du 11 septembre 2001.

La Fed a, de plus, rapidement abaissé ses taux d'intérêt, le loyer de l'argent reculant de trois points en huit mois, et s'établissant à 2,25 % depuis le mardi 18 mars, alors que la BCE répugne, face aux risques inflationnistes, à adopter pour l'instant de telles mesures. Au mois de mars, l'institut d'émission américain a aussi accepté de supporter certains des risques des banques en leur proposant une opération de 200 milliards de dollars d'échange temporaire de titres hypothécaires, peu prisés en ce moment, à condition qu'ils soient bien notés, contre des emprunts d'Etat sans risques. Mais, souligne une note de la société de Bourse Aurel du 10 avril, dans ce domaine du soutien au secteur bancaire, la Fed n'a fait que se rapprocher des moyens d'action de la BCE, dont les possibilités d'intervention sont plus larges. L'institut d'émission européen accepte en effet que des titres hypothécaires lui soient donnés en garantie dans ses opérations de financement. Allant finalement plus loin, la Fed a aussi apporté une garantie de 29 milliards de dollars d'engagements à la banque Bear Stearns pour faciliter son sauvetage.

La Banque d'Angleterre a mis ses pas dans ceux de la Fed, lundi 21 avril, en annonçant qu'elle apportait 50 milliards de livres (63 milliards d'euros) aux banques sous la forme de titres d'Etat, sans risque, en contrepartie de titres hypothécaires. Si les initiatives des banques centrales ont rassuré les marchés, qui ont compris qu'elles ne laisseraient pas un grand établissement financier faire faillite, la confiance n'est cependant pas encore revenue sur le marché interbancaire.

Pour éviter, à l'avenir, la répétition des crises, les banques centrales ont ouvert un autre chantier : l'adaptation de la régulation. Le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, qui comprend les représentants des banques centrales des treize principaux pays développés, et le Forum de stabilité financière du G7, qui réunit banquiers centraux, ministres des finances et autorités de régulation de chaque pays, plus le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et la Banque des règlements internationaux, ont fait des propositions pour assurer plus de transparence, renforcer les fonds propres, améliorer la surveillance ou revoir les règles d'évaluation à la valeur de marché. En même temps, les banques centrales doivent faire face aux aspects globaux de la crise : la résurgence de l'inflation, le ralentissement économique ou les désordres sur le marché des changes, qui confrontent leurs politiques monétaires à de délicats arbitrages. Et l'envolée de l'euro face au dollar pose un défi à la BCE, qui dispute aux Etats européens la responsabilité de la politique de change.

A. de T.

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