4. Pétrole et métaux battent des records

Le prix du baril a plus que doublé depuis le début 2007 et l'étain a atteint 21 750 dollars la tonne

Le ralentissement de la croissance mondiale n'empêche pas le choc pétrolier de se poursuivre. Autour des 120 dollars en avril, le prix du baril a plus que doublé depuis son niveau de janvier 2007 (58 dollars) et son augmentation est encore plus impressionnante depuis le krach de l'or noir d'il y a dix ans, qui l'avait vu coter 10,76 dollars, le 12 décembre 1998. Sur les marchés, les prix de l'énergie comme des métaux ont triplé depuis le début de l'année 2003, période où la croissance mondiale s'est maintenue autour des 5 % et celle des pays émergents s'est envolée, comme en Chine et en Inde, deux pays grands consommateurs de pétrole et de matières premières.

Cette tendance haussière n'empêche pas les marchés d'être très chaotiques. Jeudi 17 avril, le cuivre a, par exemple, battu un record historique à 8 800 dollars la tonne tout comme l'étain, à 21 750 dollars la tonne alors que le zinc, à l'inverse, reste loin de ses records de 2006. Soutenu par la spéculation, l'or, valeur-refuge, a dépassé le plafond symbolique des 1 000 dollars l'once au mois de mars, avant de se replier. Les tensions géopolitiques mondiales, qui persistent et se conjuguent au report de capitaux sur les marchés de matières premières - un phénomène accentué depuis la crise financière puisqu'ils servent d'alternative aux autres placements -, expliquent en partie ces hausses. De plus, la demande des pays émergents, moins touchés par le ralentissement de l'activité, reste dynamique : la Chine a connu en mars sa plus forte augmentation de la demande en produits pétroliers depuis dix-neuf mois (+8 %).

Phénomène nouveau, la chute du dollar accentue aussi ce mouvement, car la relation entre le prix de l'or noir et du billet vert s'est inversée. De 1980 à 2004, une hausse de 10 % des prix du pétrole s'accompagnait d'une appréciation de l'ordre de 9,5 % du billet vert, a calculé Valérie Mignon, professeur d'économie à l'université Paris-X. Les producteurs d'or noir épargnaient en effet leurs recettes en actifs libellés en dollars, ce qui conduisait à une appréciation de la monnaie américaine. Aujourd'hui, à l'inverse, la faiblesse du billet vert s'accompagne de la hausse du prix du pétrole. Une réalité qui, selon Mme Mignon, s'explique en partie par " la place croissante de la Chine dans le paysage économique ", devenue le deuxième consommateur d'or noir mondial. Or l'empire du Milieu a un régime de change fixe par rapport au dollar : la chute du billet vert favorise par conséquent ses exportations, sa croissance et donc sa demande d'énergie. D'autres facteurs sont avancés : la diversification des réserves de change et de l'épargne des pays producteurs de pétrole vers d'autres devises que le dollar, ou encore le fonctionnement des marchés : la baisse du dollar pousserait ceux-ci à anticiper une réduction de l'offre de pétrole des pays producteurs qui chercheraient ainsi à compenser l'amoindrissement de leur pouvoir d'achat en dollars.

Adrien de Tricornot

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